Il y a de ces moments de grâce où un enseignant a l’impression d’avoir repéré la perle rare. Il y a aussi de jeunes talents, latents mais bien réels, qui n’attendent souvent qu’un coup de pouce pour se révéler. C’est une belle histoire du genre qui entoure le cheminement d’Isaac Millian Valladares, lauréat en mai dernier de la médaille d’or, catégorie Service de la restauration, aux Olympiades québécoises de la formation professionnelle 2014.
Par Marie-Carole Daigle
« J’ai tout de suite senti qu’Isaac avait quelque chose de spécial », relate Stéphane Dumont, son enseignant actuel au Centre de formation professionnelle (CFP) Jacques-Rousseau, en se remémorant le jour où il a vu cet élève du secondaire participer à une journée d’immersion. « Je lui ai proposé d’entamer son cours en Service de la restauration chez nous, mais il a préféré attendre, car il n’avait que 15 ans. L’année suivante, je voulais être sûr qu’il accepte. À sa deuxième visite, je l’ai donc invité à causer « avenir » avec moi, en présence de ses parents. »
« Monsieur Dumont a vu que j’avais un talent caché, explique le jeune Isaac, qui s’exprime parfaitement en français, langue apprise en classe d’accueil il y a six ans à son arrivée de Cuba. Mais sur le coup, j’étais surtout intéressé par le fait que je n’aurais plus de cours de mathématiques ! reconnaît-il avec humour. Rapidement après mon arrivée au programme d’attestation d’études professionnelles (AEP), nous avons commencé à préparer la Compétition régionale Montérégie 2014. Nous y avons consacré entre 40 et 60 heures, et j’ai gagné la médaille d’or ! Il faut dire que lorsque j’ai quelque
chose en tête, je vais jusqu’au bout… »
Heureusement qu’Isaac est ainsi fait, car tout de suite après, il devait se préparer aux Olympiades québécoises. L’élève et son équipe d’encadrement ont ainsi dû consacrer environ 200 heures de préparation pour pouvoir affronter en mai les meilleurs espoirs du Québec.
Les Olympiades québécoises durent deux journées de six heures chacune. « Elles comportent plusieurs mises en place, un service de table d’hôte à quatre clients, un service de potage à l’anglaise, un autre au guéridon avec montage de mayonnaise, et j’en passe », énumère son enseignant.
Et Isaac a décroché l’or ! « Mon enseignant Stéphane Dumont, mon conseiller en vins Michel Bourdeau et la direction… tous étaient émus. Et je sais maintenant que non seulement la patience et le temps, mais aussi la confiance que j’ai mise envers ceux qui m’entourent sont responsables de ce succès. Je n’étais pas toujours d’accord avec eux, mais finalement, ils savaient vraiment ce qu’ils me faisaient faire ! »
Son enseignant renchérit : « C’était loin d’être gagné d’avance, mais Isaac a réussi à surpasser des candidats de très grandes écoles. Ce jeune a un potentiel immense, et nous allons rester derrière lui, assure-t-il. »
Pour le dernier stage de son AEP, Isaac mettra ses compétences en pratique au Primi Piatti de Saint-Lambert (Rive-Sud de Montréal). Plus tard, il compte élargir ses compétences en obtenant une Attestation de spécialisation professionnelle en sommellerie. « Je pourrais aussi enseigner et j’aimerais bien être un « ambassadeur » [du métier], dit-il. J’ai envie de démontrer qu’un vrai serveur, ce n’est pas un simple porteur d’assiettes. »
Qu’on se le tienne pour dit, car celui qui parle est quelqu’un qui va… « jusqu’au bout » lorsqu’il a quelque chose en tête !
Photo : © Pierre Beauchemin