Un secteur aussi important que celui de la restauration qui affiche si peu de mobilisation, c’est triste ! Peu importe les associations, les tables de rencontre ou les événements mobilisateurs, l’industrie n’est pas au rendez-vous quand vient le moment de montrer sa grandeur. Vous êtes certes disponibles pour visiter un salon de ventes ici et là, mais quand vient le temps de faire entendre votre voix, c’est le silence total.
Prenons en exemple la bataille autour des frais de réservation. Il y a bien eu quelques sorties dans les médias, et des posts sur les réseaux sociaux s’affichent à l’occasion. Pourtant, selon des chiffres avancés dernièrement, on parle de pertes de 100 000 $ par année et jusqu’à 30% d’annulations dans les restaurants.
Ce fléau est omniprésent dans les discussions de l’industrie depuis un bon 10 ans. Mais qu’avez-vous fait pour vous exprimer dans ce dossier ? À part ajouter en douce sur vos plateformes des frais de réservation, comment avez-vous manifesté votre désir de changement ?
Ce ne sont pas les moyens qui manquent ; c’est la détermination ! Si les pertes liées aux annulations ou autres frais sont vraiment une question de survie et de rentabilité, ça mérite bien un peu de temps dans votre horaire.
L’importance de consacrer du temps à la coopération pour dynamiser et unifier l’industrie n’est pas à prendre à la légère non plus. On est disponible pour une soirée de gala organisée par une bonne œuvre ou on donne du temps et des produits (et même des repas), mais on ne dispose pas de temps pour faire une lecture sur les sujets d’actualité ou de formation ?
Vous, les restaurateurs indépendants, êtes beaucoup plus puissants que l’ensemble des chaînes et groupes quand vous arrivez à parler d’une même voix. Faites-vous entendre. Pour cela, vous devez être informés et vigilants – cela passe notamment par un abonnement à notre infolettre et par un suivi de l’actualité de l’industrie. Sans être la ressource ultime, HRImag est à mon avis un point de départ incontournable pour les gens de notre industrie qui souhaitent évoluer.
J’espère que les prochaines années seront celles de propriétaires, exploitants, dirigeants et acteurs du secteur plus impliqués et professionnels, qui chercheront à faire autrement que ce qui a toujours été fait !
Portraits
Dominique Roy : « Le futur est de plus en plus végétal »
Course à pied, cuisine végane, guide Michelin : on a discuté à bâtons rompus avec Dominique Roy, chef originaire de Gatineau et aujourd’hui associé du restaurant Eleven Madison Park, à New York.
Dominique Roy arrive un peu en retard à l’entrevue. Il s’excuse : il est très occupé par le changement de menu de son restaurant, qui vient de lancer sa carte de printemps. Artichauts, asperges vertes, betteraves jaunes… Depuis sa réouverture après la pandémie, les légumes règnent en maître au Eleven Madison Park, qui propose désormais un menu sans aucun produit d’origine animale. Un changement audacieux pour le restaurant new-yorkais, premier établissement exclusivement végane de l’histoire du Michelin à être triplement étoilé.
Le « EMP » – comme l’appelle Dominique Roy – a remporté en 2017 la première place du World’s 50 Best Restaurants et il arbore ses trois macarons depuis 2012. Mais en 2020, la pandémie frappe et tous les restaurants ferment. Le chef propose alors son aide à l’un de ses amis, fondateur de l’OBNL Rethink Food, qui apporte des repas aux jeunes démunis. L’association allait dans les restaurants récupérer des restes alimentaires et épluchures, qu’elle cuisinait ensuite.
Alors que les besoins augmentent dans la foulée de la pandémie, le EMP et d’autres établissements rallument leurs fourneaux. « Pendant un an et demi, on a transformé notre cuisine pour préparer des plats destinés aux gens démunis et aux travailleurs de la santé. On faisait jusqu’à 6000 repas par jour », se souvient le chef, qui n’était accompagné au départ que de son associé Daniel Humm et d’une cheffe pâtissière. « Par la suite, on a pu embaucher une équipe de 10 personnes, qui a grossi jusqu’à 30 employés. On a fait un million de repas cette année-là. »
Virage végane
La pandémie a aussi poussé l’équipe à revoir sa façon de travailler. « Pendant cette période, on s’est vraiment questionnés sur le type de restaurant qu’on voulait rouvrir, raconte Dominique Roy. Ça faisait déjà plusieurs années qu’on voulait changer, qu’on parlait de supprimer certains produits comme le caviar. On avait atteint un très haut niveau, mais notre style de cuisine et notre format du menu restaient assez classiques. La fermeture était l’occasion de faire un changement radical. On a donc pensé à éliminer les poissons et les viandes. De là, on s’est dit : "Pourquoi ne pas être véganes ?" »
Le choix a été motivé non seulement par le fait qu’il permet de pousser la créativité en cuisine, mais aussi parce que le régime végane est meilleur pour la santé et pour la planète, souligne le chef, qui mange désormais des repas sans produits d’origine animale de cinq à six jours par semaine. « On sentait fort que c’était la bonne chose à faire. »
La transition ne s’est cependant pas faite sans inquiétude. « Je n’avais jamais cuisiné comme ça avant. C’était épeurant, confie-t-il. Je me demandais si on allait pouvoir faire des plats aussi bons qu’avant, si on allait pouvoir retrouver l’engouement qu’on avait avec nos anciens plats signature. » L’équipe jette les recettes avec lesquelles elle travaillait depuis 15 ans et recommence à zéro autour d’une nouvelle vision basée sur les végétaux.
« Je me suis rendu compte que certains produits ou ingrédients ne sont pas nécessaires pour créer des plats délicieux et luxueux – la crème, le beurre, le bouillon de volaille… On a réappris à faire des bouillons, et on arrive aujourd’hui à préparer des sauces onctueuses, umami et avec de la rondeur sans produit animalier, assure-t-il. Il y a tellement de légumes ou de grains qui ne sont pas assez utilisés ! Ça a changé ma vision de la cuisine. Si j’ouvrais un autre restaurant demain, il resterait à 90 ou 95 % végane. »
Prendre des risques
Quand l’EMP a rouvert il y a trois ans, c’était donc avec un nouveau menu complètement végane, qui change depuis chaque saison. Dès la réouverture, le restaurant a affiché complet pour les six mois à venir. En 2024, avec 12 menus véganes au compteur, il a reçu ses étoiles Michelin pour la troisième année consécutive. « On a donc vraiment réussi », affirme Dominique Roy.
Ça n’a pourtant pas été si facile, au début. Certains habitués n’étaient pas prêts à payer ce prix pour « ne manger que des légumes », et quelques critiques ont affirmé que ce virage était une lubie qui ne durerait pas. Depuis, la clientèle a changé : elle est notamment plus jeune et « très excitée à l’idée de manger complètement végane ». Et les anciens fidèles commencent tranquillement à revenir, y compris certains sceptiques. Le restaurant est aujourd’hui plus occupé que jamais. Pour le chef, le secret de ce virage réussi a été de savoir prendre un pas de recul sur la cuisine, et surtout d’oser faire quelque chose que les autres ne seraient pas prêts à faire.
Prendre des risques, c’est un peu ce que Dominique Roy a fait il y a huit ans lorsqu’il a pris un autobus avec une valise depuis Gatineau pour se rendre à New York. Diplômé de l’École hôtelière de l’Outaouais, il avait déjà travaillé dans quelques grandes maisons en Europe (Maaemo en Norvège, Mirazur en France) et fait de la compétition, et voulait continuer à se dépasser et à apprendre. « Malheureusement, il n’y avait pas d’étoilé au Canada à l’époque, regrette le chef. Les Michelin, c’est vraiment quelque chose de spécial qui aide les restaurants à se dépasser. Je voulais ça. »
Il va donc frapper à la porte du Eleven Madison Park. Là, il se fait offrir un emploi à l’issue d’une journée de stage. Il est ensuite promu sous-chef, avant de passer deux années à la recherche et au développement pour créer les plats du restaurant et ceux des autres établissements du groupe (le NoMad, notamment). Après la pandémie, il devient chef, puis associé en 2023.
Le plafond montréalais
Le jeune trentenaire se plaît certes beaucoup dans la Grosse Pomme, mais il garde une affection toute particulière pour le Québec, notamment Montréal et « sa scène culinaire exceptionnelle ». « Quand je dis que je suis québécois, la première chose dont les gens me parlent, c’est à quel point les restaurants sont délicieux et cools. On n’a rien à envier à ailleurs en matière de créativité, de qualité, de produits… »
Si la métropole québécoise n’a pas encore décroché d’étoile, au contraire de sa voisine ontarienne, c’est une question d’argent, estime le chef. « Quand tu as trois macarons sur ton menu, les gens sont prêts à payer un prix plus élevé, et ça fait en général une grosse différence pour les restaurants gastronomiques. Si tu doubles le prix de ton menu, tu vas être capable de faire deux fois plus : produits plus chers, plus grosse équipe, etc. Mais il y a un plafond dans ce que la clientèle montréalaise est prête à payer. Si on compare le prix de ses menus dégustation avec ceux de Toronto, ça n’a rien à voir ; c’est du quitte au double. »
Dominique Roy ne parle plus aujourd’hui d’ouvrir un restaurant au Québec, comme il l’évoquait par le passé. Il a adoré vivre à Montréal et il aime tout autant la province, mais il dit désormais se sentir « à la maison » à New York. « J’ai des projets pour les quelques prochaines années. Je suis très heureux ici, pour le moment. Mais… sait-on jamais ? »
Ce qu’il doit à New York, c’est surtout sa collaboration avec Daniel Humm, son partenaire au EMP, avec qui il cuisine, court plusieurs fois par semaine (voir encadré) et voyage de par le monde pour assister à des événements culinaires… « J’ai eu la chance d’avoir travaillé avec plein d’excellents chefs, mais le mentorat avec Daniel a été vraiment spécial. Lui et moi, on est très similaires, confie-t-il. Ces dernières années ont été les plus importantes et marquantes de toutes. J’ai toujours rêvé d’avoir mon restaurant à moi ; mais là, c’est plus grand que ce dont j’aurais osé rêver. »
Et Make it Nice, la compagnie derrière EMP, a de nouveaux projets en préparation : si le groupe a rapetissé pendant la pandémie pour se concentrer sur son restaurant phare, il veut maintenant grandir. En parallèle, Dominique Roy a à cœur de communiquer autour du végétalisme.
« Les gens pensent qu’on a pu devenir végane parce qu’on est le Eleven Madison Park et que nos menus sont très chers, mais que ce n’est pas à la portée de tous les restaurants. Nous, on veut démontrer le contraire. On veut faire connaître et partager ce qu’on fait, nos façons de cuisiner… Ça passera peut-être par un livre de recettes, par exemple. On mène beaucoup de projets pour atteindre cet objectif : rendre la cuisine végétale de plus en plus accessible, à de plus en plus de monde. »•
COURS, CHEF, COURS !
Il y a six ans, Dominique Roy a commencé à faire de la course à pied à un rythme soutenu. Et il voit beaucoup de parallèles entre la cuisine et le sport – surtout quand on pratique les deux à un haut niveau. « La course m’a vraiment aidé à grandir. Comme en cuisine, il faut réussir à se pousser et apprendre à être confortable dans des situations inconfortables », résume le chef. Travailler au EMP lui demande beaucoup de discipline, d’organisation, d’entraînement et de focus.
On lui demande souvent comment il arrive à courir aussi intensément et à faire des marathons malgré son horaire de travail très prenant. « Pour moi, c’est l’inverse : je ne pourrais pas faire tout ça sans pratiquer la course à pied, répond-il. Réussir à performer en cuisine avec le stress et le peu de sommeil qui va avec, ça demande de prendre soin de soi et de son mental. Moi, j’ai besoin de mon entraînement physique pour être un meilleur chef. »
Dominique Roy pourrait être qualifié d’hyperactif. Pour réussir à aller loin en cuisine, il faut certes être énergique et aimer les environnements intenses. Être hyperactif peut aider, mais il faut surtout aussi, selon le chef, être positif et très, très passionné… Un peu comme en sport, finalement.
Voilà déjà un an que nous avons transformé nos façons de faire en confiant la totalité de nos ventes à notre équipe interne. Depuis 2023, c’est donc une seule et même équipe de représentants qui s’occupe tant de notre clientèle de la vente au détail que de celle des HRI. Quand nous avons conçu cette nouvelle approche commerciale, nous avions en tête des objectifs clairs. Eh bien, nous pouvons maintenant vous dire que nous les avons atteints !
Puisque nous faisons désormais directement affaire ensemble, nous avons pu créer en un an une superbe proximité avec vous. En effet, notre division de la production, notre service d’approvisionnement et notre équipe de vente se côtoient au quotidien. Résultat ? Une meilleure circulation de l’information sur les enjeux de production, la disponibilité et les innovations. Bref, tous les suivis sont maintenant extrêmement rapides et efficaces, et vous êtes nombreux à vous en réjouir.
Une équipe encore plus à l’écoute
Vous gérez un restaurant, un supermarché, un commerce de quartier, une maison d’enseignement ou une autre institution ? En échangeant avec vous sans intermédiaire, nous sommes mieux outillés pour cerner rapidement vos besoins et vos attentes. Nos spécialistes savent écouter et vont vous aider à élaborer un assortiment de desserts répondant parfaitement aux attentes de votre propre clientèle et aux tendances actuelles.
Nous pouvons même, en collaboration, développer ensemble des produits sur mesure parfaitement adaptés à vos exigences. À vrai dire, nous l’avons déjà fait à quelques reprises, cette année, par exemple en développant notre nouvelle gamme Signature qui comprend des desserts servis dans les établissements haut de gamme, comme notre Croustillant camerise et mascarpone et notre Mi-cuit au citron. Un désir a été exprimé : nous l’avons réalisé !
Pour atteindre nos ambitieux objectifs, nous avons accueilli de nouveaux membres dans notre équipe au fil des mois. Nous sommes d’ailleurs fiers d’annoncer que l’Outaouais dispose désormais de son représentant attitré, installé depuis peu sur place. Sa présence physique dans la région va simplifier les échanges, favoriser les rencontres et personnaliser encore plus le service qui y est offert.
Avec sa nouvelle structure de ventes en place, Martin Dessert a le vent dans les voiles. Nous envisageons même de nous lancer vers de nouveaux horizons en explorant non seulement les marchés du reste du Canada, mais également celui des États-Unis.
Communiquez
avec votre représentant !
Il est plus simple que jamais d’obtenir des conseils d’un expert en desserts, pour votre point de vente comme pour votre restaurant. Vous ne savez plus trop comment gérer votre offre ? Vous êtes à court d’idées ?
Vous souhaitez innover ? Notre équipe dynamique
et créative est là pour vous guider.
Après plus de 25 ans endormi entre les murs du Centre Eaton à Montréal, Le 9e s’est refait une beauté dans son style originel, imaginé par l’architecte français Jacques Carlu en 1931. Visite guidée de ce lieu qui accueille de nouveau un restaurant.
Neuvième étage. À peine sorti de l’ascenseur, on est plongé dans les années 1930. Du sol au plafond, le large foyer-promenoir menant au bar revêt les apparats de l’époque. Le parquet en marqueterie de chêne lustré et les marbres muraux en témoignent.
Installé dans un bâtiment classé immeuble patrimonial en août 2000 et laissé vacant depuis 1999, Le 9e se devait de retrouver son look d’autant. « Valoriser ce patrimoine en décrépitude, c’était véritablement le défi du projet », assure Jimmy Levesque, responsable du chantier de rénovation qui a duré plus d’un an et demi. Tous les matériaux d’origine ont été conservés pour redonner vie à cet endroit emblématique du centre-ville de Montréal.
« Montrer la magie de cet espace »
Le majestueux bar de forme ovale fait le lien entre les promenoirs et la Grande Salle. Conçue à la manière de la nef du célèbre paquebot Île-de-France, qui naviguait entre les deux continents à l’époque, cette dernière conserve son rôle en accueillant des spectacles, des expositions et des événements privés. Sa hauteur d’environ 35 pieds impressionne. Aux extrémités, au-dessus des fontaines (non fonctionnelles), les peintures murales d’Anne Carlu, épouse de l’architecte, dominent l’espace. Des hauts-reliefs viennent couronner le tout.
« Dans un lieu comme celui-là, il faut se mettre en deuxième position, estime Georges Drolet, architecte au cabinet EVOQ Architecture et collaborateur du projet. Il a fallu comprendre quelles étaient les idées de l’architecte de l’époque et les respecter. On est petit à petit arrivé à montrer la magie de cet espace tel que Calu l’avait imaginé dans son ensemble, pour le plaisir des Montréalais. » Mélange entre art déco et paquebot, Le 9e fait de nouveau voyager.
L’espace comprend le restaurant Île-de-France qui compte 120 places, ainsi que des salles privatives, soit le Salon Argent et le Salon Or, situés dans deux alcôves de la Grande Salle. Elles peuvent accueillir 20 personnes chacune. Un bar qui sert des cocktails ainsi qu’un café situé au rez-de-chaussée de l’immeuble complètent l’offre. Au maximum de sa capacité, Le 9e nouvelle génération peut accueillir environ 500 personnes.
Côté cuisine
Après être passé par les cuisines du McKiernan et du Park à Montréal et avoir dirigé son propre restaurant, le Hopkins, le chef exécutif Liam Hopkins est aux fourneaux du nouveau restaurant Île-de-France, épaulé par le directeur culinaire Derek Dammann, venu de Maison Publique. Les deux cuisiniers proposeront une offre gastronomique inspirée du menu de l’établissement d’origine, assorti des tendances actuelles. Pour les cocktails, Andrew Whibley du Cloakroom et du Bar Dominion prend les shakers en main. Dominique Jacques, du Melk, s’est joint à l’espace café.
Les défis de...
Valeurs nutritionnelles : moins de sel, moins de gras
Dans une société où l’alimentation saine prend une importance croissante, le gras, le sucre et le sel, amis du goût, sont plutôt considérés comme des ennemis de la santé. Alors que les clients désirent en consommer moins, les restaurateurs n’ont pas vraiment le choix et doivent leur proposer des menus qui vont dans ce sens.
Les restaurateurs sont contraints d’être de plus en plus transparents et de dévoiler les aliments qu’ils utilisent pour répondre à une clientèle curieuse de savoir exactement ce qu’elle mange. Des efforts à ce chapitre ont notamment été réalisés par les chaînes de restauration ces dernières années : des Rôtisseries St-Hubert aux restaurants de déjeuners Cora, en passant par les restaurants grecs Au Vieux Duluth, de très nombreuses chaînes affichent maintenant les valeurs nutritives de leurs plats sur leur site web.
La Cage – Brasserie sportive est du nombre. Il y a 15 ans déjà qu’elle collabore avec une diététiste pour évaluer les calories de ses plats, et surtout pour connaître les dangers d’allergies qu’ils comportent. Aujourd’hui, tous les plats et leurs différentes déclinaisons sont disséqués en protéines, glucides, fibres, sucre, gras, fer, calcium et sodium. « On donne beaucoup plus d’information qu’avant. On sait que manger santé, c’est quelque chose que les clients regardent », mentionne Émilie Santerre, directrice principale du marketing et des communications à La Cage.
Pour s’adapter à cette nouvelle tendance, les brasseries sportives ont d’ailleurs effectué une transformation en profondeur de leur menu. « On s’est dit : pourquoi ne pas s’ouvrir à tous ? On a donc essayé de garder le cœur de ce qu’était notre menu, soit les hamburgers et ailes de poulet – nos meilleurs vendeurs –, tout en offrant des ingrédients plus frais », explique Émilie Santerre.
Le menu de la chaîne change désormais quatre fois par an, selon les saisons. « On utilise des aliments locaux. Tous nos produits sont faits maison, dans les restaurants de la chaîne, et non pas envoyés d’un entrepôt central. Les tartares sont coupés sur place, les sauces sont faites sur place », énumère le chef corporatif de La Cage, Denis Dupuis. Ces changements n’ont apporté que du positif, assure Émilie Santerre : « Nos clients nous parlent de la qualité de ce qu’on sert. Ils se déplacent pour ça. »
Améliorer la qualité nutritive
À l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ), on se préoccupe également de ce que servent les restaurants. Et on leur propose actuellement un service gratuit : le Service d’accompagnement en amélioration de la valeur nutritive des aliments au menu. Financé par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) dans le cadre de la Politique bioalimentaire que le gouvernement a adoptée en 2018, ce service fait l’objet d’un projet pilote de deux ans qui prendra fin en mars 2025.
Dirigé par des nutritionnistes, un technologue alimentaire, des chefs et une professeure en science des aliments, il vise à analyser le menu d’un restaurant donné et à cibler jusqu’à trois plats dont on pourrait améliorer les qualités nutritives. On tente aussi d’élaborer un menu constitué d’aliments locaux, tout en gardant un prix concurrentiel. « On veut diminuer l’apport en sel, en gras et en sucre des plats et augmenter leur apport en fibres. Mais on veut aussi qu’ils aient un goût savoureux », précise Mélanie Bergeron, directrice du Centre d’expertise de l’ITHQ.
Le programme permet ensuite à l’équipe d’adapter les nouvelles recettes pour les standardiser et les rendre exploitables dans un contexte commercial. Douze chaînes de restaurants et opérateurs de cafétérias ont été sollicités pour former la première cohorte, et trois ont décidé de participer au projet : Toujours Mikes, Madisons Restaurant & Bar et Coopsco, réseau d’une centaine de cafétérias en milieu scolaire. Ils termineront très bientôt les quatre à six mois de participation prévus.
« On va bientôt entrer en analyse de ce qui a été accompli, puis on va faire un autre appel d’intérêt. Les entreprises désireuses de participer peuvent nous écrire via notre site web », note Mélanie Bergeron. Pour le moment, seules de grandes entreprises ont été sollicitées. « On voulait toucher le plus de consommateurs possible, avoir le maximum de portée. On préférait une entreprise servant 3000 personnes par semaine plutôt que 300, mentionne Marie-Josée Denis, chargée de projet. On voulait aussi faire du travail de substance. Il fallait qu’il y ait un défi, une belle transformation visible ; on ne voulait pas seulement améliorer une vinaigrette… »
Selon elle, c’est d’abord la quantité de sel ajoutée à leurs repas qui préoccupait les trois participants au programme. « La première porte d’entrée a été le sel. Mais en analysant leurs plats, on se rendait compte que certains n’en contenaient pas tant que ça, et que c’est plutôt autre chose qu’on devait travailler. »
L’ITHQ espère déjà que l’expertise qu’elle est en train de développer puisse être transmise de façon permanente. « Notre but est que ce service perdure. On a l’impression qu’il va créer un effet d’entraînement. Si c’est le cas, même sans subventions, on pourrait ouvrir la porte à une forme de service-conseil », souhaite Mélanie Bergeron.
Des coûts élevés pour les indépendants
Le programme aurait cependant un prix que tous ne pourraient pas se permettre. La directrice du Centre d’expertise de l’ITHQ estime les frais d’accompagnement à 25 000 $. À cela s’ajoutent des coûts pour le restaurateur, qui doit mobiliser une équipe, lui accorder du temps pendant et après l’accompagnement, et ensuite pour effectuer les changements du menu et la formation des cuisiniers.
C’est justement le manque de moyens financiers et de temps qui expliquent que peu, ou même aucun, de petits restaurateurs indépendants affichent la valeur nutritive de leurs plats malgré l’engouement des clients pour cette information, croit Linda Girolamo, propriétaire de la Pizzeria Napoletana, située dans la Petite-Italie à Montréal. « On a vu il y a quelques années que la tendance allait vers ça. On y a réfléchi, mais pas plus qu’il ne le faut. Il y a beaucoup de frais associés, et en tant que restaurateurs indépendants, on n’a pas le temps. On fait tout : on reçoit les clients, on est dans la cuisine… Avec la pénurie d’employés depuis la COVID, je fais même la plonge certains soirs. »
La restauratrice est d’ailleurs persuadée que l’absence de mention des valeurs nutritives dans son menu indiffère la clientèle de son petit restaurant familial. « Les grandes chaînes les affichent parce qu’elles ne servent pas de produits à l’état naturel et elles sentent le besoin de rassurer leur clientèle. Mais la nôtre a confiance en ce qu’elle mange ; elle sait que tout est fait sur place. On fait nos pâtes fraîches, nos pâtes à pizza, notre sauce tomate, on reçoit nos légumes tous les jours du marché Jean-Talon », dit-elle.
Qu’en est-il de l’importante source de calories que peuvent être les pâtes et la pizza ? « Il n’y a pas de mauvais aliments à manger. La pizza, ce n’est pas du fast-food. C’est très santé : ça apporte les quatre groupes alimentaires. Tout dépend de l’endroit où tu la manges », juge-t-elle. Elle en veut pour preuve beaucoup de clients réguliers en bonne santé. « J’ai des clients qui viennent cinq fois par semaine depuis 30 ans. Francis, entre autres, a un corps parfait ! »
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