Punaises, rongeurs et autres visiteurs indésirables : vous les craignez à juste titre, car ils peuvent causer bien des dommages, de la simple perte d’aliments à la perte d’une réputation chèrement acquise ! Une gestion parasitaire vigilante peut vous éviter bien des maux de tête.
INSECTES ET RONGEURS
Les quatre insectes nuisibles les plus communs que l’on trouve dans les cuisines au Québec sont la mouche à fruits, ou drosophile, la mouche domestique, la blatte germanique (mieux connue sous l’appellation incorrecte de « coquerelle ») et la fourmi. Chez les rongeurs, souris et rats sont courants. Voici quelques recommandations pour éviter que ces petites pestes envahissent votre établissement, et sur les façons de s’en débarrasser. On recommande généralement aux restaurateurs de faire affaire avec des professionnels de la gestion parasitaire qui effectueront des inspections préventives mensuelles et vous aideront à implanter un programme. Ils détecteront les failles dans les bâtiments et relèveront les mauvaises pratiques susceptibles de favoriser les infestations. À condition de travailler en étroite collaboration avec eux et de suivre leurs conseils ; c’est le meilleur gage de succès en matière de gestion parasitaire !
Mouche à fruits
Les mouches à fruits sont attirées par les endroits où l’on trouve des sucres en fermentation, comme dans les fruits trop mûrs, l’amidon des pommes de terre, les fonds de bouteilles de boisson, les pompes à bière mal nettoyées et la vaisselle sale. Elles aiment aussi faire leur nid dans les endroits malpropres et humides comme les vadrouilles non asséchées, les linges humides et les eaux stagnantes sur des appareils ou des planchers mal nivelés. Pour ces raisons, il est recommandé :
- d’avoir, sur les drains de plancher, des grillages amovibles pour permettre le nettoyage,
- d’éliminer les eaux stagnantes,
- de faire une rotation régulière des aliments,
- de bien rincer les bouteilles vides,
- de ne pas laisser de vaisselle non lavée sur les comptoirs.
La propreté générale est le meilleur moyen d’éviter que les mouches à fruits se développent, et l’on peut s’en débarrasser à l’aide de pièges collants et d’insecticides.
Mouche domestique
La mouche domestique est difficile à contrôler à cause de sa mobilité. Elle est évidemment attirée par la saleté et la nourriture. « On ne peut pas éliminer toutes les mouches, surtout avec une terrasse, mais la loi demande de ne pas les tolérer à l’intérieur, dit Ginette Bourgeois, consultante en hygiène, salubrité et gestion parasitaire, formatrice et responsable de l’hygiène et de la salubrité au Stade olympique. Même si la mouche est un insecte socialement toléré, elle transporte beaucoup de maladies et contamine les aliments. Un restaurant doit avoir des moustiquaires sur toutes ses fenêtres et laisser ses portes fermées. » En cas de problème, on installe des pièges collants.
L’intérieur d’une trappe à graisse peut être propice au développement de petites mouches.
Un simple trou dans le mur peut devenir un problème si des débris de nourriture s’y logent, car les petites mouches aiment s’y reproduire.
Les mouches sont attirées par les ondes émises par les néons et sont prises au piège sur la surface encollée à l’intérieur du dispositif.
Fourmi
La fourmi est un insecte extérieur qui s’adapte très bien à l’intérieur. Attirée par les aliments, elle s’infiltre par les plus petits interstices. « On peut installer des petits appâts empoisonnés où les fourmis qui se promènent vont se nourrir et ensuite contaminer leur nid et tuer les reines, dit Pierre St-Louis, exterminateur et président de l’Association québécoise de la gestion parasitaire. On peut aussi prévenir en mettant des produits aux endroits stratégiques. »
Blatte
Le saviez-vous ? Le mot coquerelle est un anglicisme qui vient de « cockroach ». Son vrai nom est la blatte, et la variété que l’on trouve ici est la blatte germanique. Elle est attirée par la saleté et la nourriture, et peut entrer dans un bâtiment de mille façons : par la tuyauterie, par les trous dans les murs communs à d’autres édifices infestés, mais aussi par les aliments livrés par vos fournisseurs. « Gardez un oeil sur vos livraisons et essayez de détecter les fournisseurs qui ont des problèmes, dit Steven Graff, directeur de l’assurance qualité chez Abell Pest Control. Il faut aussi sceller autant que possible tous les trous dans les tuiles des planchers et des murs. » Depuis une dizaine d’années, une nouvelle génération de produits à base d’hormones sexuelles empoisonnées permet de bien contrôler les problèmes de blattes, explique Pierre St-Louis. « Avant, il fallait chercher les blattes là où elles se cachaient, dit-il. Maintenant, on les attire grâce à ces appâts. C’est la meilleure solution, tant qu’elles n’auront pas développé de résistance à ces produits, ce qui pourrait arriver un jour. »
Insecte de farine
On les appelle communément vers de farine, mais ce sont en fait des larves qui peuvent se transformer en petits papillons que l’on nomme pyrales de la farine. Ils vivent à l’intérieur même des aliments. Le meilleur moyen de les éviter est d’entreposer toute la nourriture dans des contenants hermétiques. Éviter les contenants de carton et les sacs de papier, car la larve peut se promener, percer ces contenants et contaminer votre garde-manger au complet.
Rongeurs
Saviez-vous qu’une souris peut se faufiler dans un trou aussi petit qu’une pièce de dix sous ? Pour un rat, c’est une pièce de cinq sous. Ils peuvent donc entrer de bien des façons dans votre établissement : par les murs, les portes, les sorties d’aération, les tuyaux et les égouts.
« Généralement quand on a des rats, c’est signe qu’il y a un problème avec nos égouts », dit Pierre St-Louis. Mais il ne faut pas négliger les portes non plus, car une souris est vite entrée par une porte arrière ouverte alors qu’un employé fume une cigarette pendant sa pause. On devrait sensibiliser le personnel à cet égard, sans oublier de s’assurer que les bas de portes sont bien étanches. Les rongeurs sont aussi très attirés par les déchets. « Les conteneurs à rebuts doivent être fermés et espacés d’au moins un pied des murs, dit M. St-Louis. On doit pouvoir avoir accès à l’arrière du conteneur, et éviter des accumulations de déchets le long des murs. On peut aussi placer des pièges extérieurs dans des boîtes armées d’appâts placées à l’abri de la pluie et verrouillées de façon sécuritaire, pour éviter que des enfants ou des animaux domestiques puissent y avoir accès. »
Aux restaurants Ashton, on va encore plus loin en plaçant les conteneurs à déchets dans un enclos fermé et clôturé pour un meilleur aspect visuel. « Un produit qui est intégré durant le compactage des déchets permet également de diminuer les odeurs », explique Michael Drolet, responsable du marketing.
LES PUNAISES DE LIT : UN VRAI FLÉAU !
La population de punaises de lit a connu un véritable boom au cours des dernières années dans toutes les grandes villes en Occident, selon Pierre St-Louis, qui gère sa propre entreprise depuis trente ans, Abiosphere Extermination. Et cela n’ira pas en diminuant !
« Quand j’ai commencé dans le métier, de 1986 à 2002, je n’avais pratiquement pas de demandes pour régler des problèmes de punaises, dit-il. Entre 2002 et 2007, c’était environ 50 fois par an, et maintenant, je reçois plusieurs appels par jour à ce sujet. »
Cette augmentation serait surtout attribuable au plus grand nombre de voyageurs qui vont et viennent autour du globe et les ramènent sans le savoir dans leurs bagages, notamment d’Asie.
Les punaises sont visibles à l’oeil nu, mais se cachent généralement dans les côtés des matelas, sous la doublure et près des cordons, explique Serge Rivest, exterminateur chez Extermination Techni-Bec. Les femmes de chambre peuvent deviner leur présence si elles constatent qu’il y a des petites taches de sang sur les oreillers ou les draps, car les punaises piquent les dormeurs !
De plus, leurs excréments ressemblent à des taches d’encre de couleur noire. Si ces indices sont découverts, on doit immédiatement appeler l’exterminateur pour qu’il vérifie et mette la chambre en quarantaine ; on laisse sur place tous les draps, couvertures, serviettes et rideaux, lesquels devront ensuite être mis dans des sacs fermés pour le lavage.
« Inspectez également les chambres qui sont au-dessus, en dessous et de chaque côté », dit Steven Graff.
À titre préventif, il recommande qu’au moins 10 % de toutes les chambres soient inspectées chaque mois. Le personnel d’entretien ménager devrait être formé pour être en mesure d’identifier les punaises et pour éviter de les propager d’une chambre à l’autre. « Un programme d’inspection bien documenté peut vous protéger contre les poursuites en démontrant à la cour que vous avez fait preuve de diligence, dit-il. En effet, on voit de plus en plus de poursuites contre les hôtels en lien avec les punaises. »
De plus, pendant les périodes creuses, on ne devrait pas laisser toujours les mêmes chambres libres pendant de longues périodes. « Les chambres qui ne sont pas inspectées par le personnel régulièrement sont susceptibles de permettre des infestations, car les punaises peuvent proliférer même quand elles n’ont pas de source de nourriture constante », ajoute M. Graff.
Des recouvrements de matelas spécialement conçus contre les punaises sont offerts sur le marché. « On ne devrait pas se fier uniquement aux traitements chimiques en aérosol, car ceux-ci poussent les punaises à se cacher plus profondément, et comme elles ont développé une résistance à ces produits avec le temps, elles peuvent prendre plusieurs jours avant de mourir. Pendant ce temps, elles pondront des oeufs et le problème sera de retour quelques semaines plus tard », dit M. Graff.
Le traitement des punaises de lit s’effectue par différents moyens. Elles ne survivent pas à des températures très chaudes ou très froides. Les exterminateurs peuvent utiliser des traitements à la vapeur très chaude pour les détruire, mais cette méthode requiert beaucoup de temps.
« Il faut atteindre 55 degrés pendant un minimum de quatre heures, dit Pierre St-Louis. Mais la technique la plus connue est une application d’insecticide sous forme liquide aux endroits stratégiques, et de poudre dans les appareils électriques. »
BIEN CHOISIR SON EXTERMINATEUR
Il est minuit et vous venez de découvrir que de petits hôtes indésirables ont investi votre cuisine. Surtout, ne cédez pas à la panique, et ne signez pas n’importe quel contrat sous l’impulsion du moment ! Comme dans toutes les industries, il y a de bons et de moins bons exterminateurs, et les variations de prix sont énormes d’une entreprise à l’autre, explique Ginette Bourgeois.
« L’idéal, c’est d’avoir un contrat de service de prévention mensuel pour éviter d’agir dans l’urgence, dit-elle. Il faut faire attention aux contrats signés trop vite. C’est un domaine où les gens agissent sous l’impulsion et la peur. Quand un problème arrive, la personne appelle un exterminateur, voudrait que le problème disparaisse immédiatement, et ne pose pas assez de questions. Malheureusement, il y a des individus qui abusent de ces situations et ne font pas un travail vraiment professionnel. »
« Dans un temps de récession comme celui que nous venons de traverser, le recours à un service de prévention mensuelle est l’une des premières dépenses que les gens coupent, mais ils ne devraient pas. »
Ginette Bourgeois
Comment choisir ?
« Le premier critère, comme dans toute industrie, c’est de choisir un professionnel qui fait partie d’une association, dit Pierre St-Louis. On s’assure ainsi qu’il respecte des standards et un code d’éthique. Il faut également s’assurer que l’on travaille avec un exterminateur qui a une assurance responsabilité ; celui-ci doit absolument en avoir une pour protéger autant le technicien que les clients, en cas d’accident ou de mauvaise manipulation des produits. »
Un bon exterminateur laisse des rapports et des recommandations écrits. Il est aussi en mesure de bien expliquer les garanties qu’il offre et leurs conditions. Ces garanties durent généralement de trois mois à une année, et varient selon le parasite visé, le lieu et les conditions de l’intervention.
« Comme pour n’importe quel service, le bouche à oreille est une bonne façon de trouver un professionnel qui travaille bien, dit M. St-Louis. Mais il ne faut pas hésiter à poser beaucoup de questions et à se renseigner par soi-même en lisant sur le sujet, par exemple sur Internet. »
Par ailleurs, on aura beau dénicher l’exterminateur le plus qualifié du monde, si l’on ne suit pas attentivement ses recommandations, les problèmes reviendront, affirment tous les intervenants.
LA LOI ET VOS OBLIGATIONS
Partout au Québec, à l’exception de Montréal, c’est le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) qui fait l’inspection des restaurants et autres services alimentaires pour s’assurer que ceux-ci respectent les règles d’hygiène et de salubrité. À Montréal, ce sont les inspecteurs de la Ville. Dans un cas comme dans l’autre, leur rôle est de faire respecter la Loi et les règlements sur les produits alimentaires (L.R.Q., chapitre P-29), et, en particulier, l’article 2.1.2 qui stipule que « le lieu doit être exempt de contaminants, de polluants, de toute espèce d’animaux y compris les insectes et les rongeurs ou de leurs excréments ».
En cas de non-respect de ce règlement, un établissement est passible d’une amende pouvant aller de 250 $ pour une première infraction mineure, à 2000 $ et plus en cas de problème jugé grave (comme la découverte d’excréments de rongeurs dans les aliments) ou en cas de récidive, explique-t-on au MAPAQ.
Depuis novembre 2008, les exploitants d’établissements alimentaires qui sont entrés en activité après cette date ont l’obligation de suivre une formation en hygiène et salubrité alimentaires. Depuis novembre 2009, cette obligation s’étend également aux établissements qui étaient en activité avant novembre 2008. La formation, de 12 heures pour les gestionnaires et de 6 heures pour les manipulateurs d’aliments, inclut un module sur la gestion parasitaire. Cette formation est donnée dans toutes les régions du Québec, et une liste des formateurs autorisés est publiée sur le site Internet du MAPAQ.
Photos : Abell Services Anitparasitaires