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S’adapter ou mourir, le cas des restaurants Red Lobster

 
28 juin 2024 | Par Francis Hébert-Bernier
Crédit photo: Alarmy images / Red Lobster

Après s’être mise sous la loi de la protection de la faillite en mai dernier, la division canadienne de Red Lobster a récemment obtenu l’autorisation de liquider les actifs qu’elle détient au pays. Un processus qui pourrait très bien mener à la fin des activités des 27 restaurants canadiens encore actifs de la bannière qui en détenait près de 700 mondialement.

Une fin qui n’a rien d’étonnant puisque l’entreprise n’a jamais réussi à moderniser son modèle d’affaires qui s’est ultimement avéré beaucoup trop rigide pour s’adapter aux nouvelles réalités de l’après-pandémie, remarque Frédéric Dimanche, professeur à l’école de tourisme et d’hôtellerie Ted Rogers de l’Université métropolitaine de Toronto. « Le contexte n’est vraiment pas évident actuellement pour les restaurants de milieu de gamme tels que Red Lobster », souligne-t-il.

Pas de restaurant sans main-d’œuvre

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Par exemple, tous les restaurateurs ne sont pas égaux devant la crise de la main-d’œuvre et la chaîne américaine spécialisée dans les fruits de mer n’a visiblement pas réussi à solutionner le problème, remarque Robert Laporte chercheur à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ).
« Il suffit de regarder leur horaire pour réaliser à quel point ils ne se sont pas adaptés. C’est très difficile de nos jours de convaincre du personnel d’expérience de travailler dans un restaurant ouvert de onze à onze, sept jours sur sept », observe-t-il.

De plus, avec ses grands restaurants nécessitant beaucoup d’employés tant du côté du service que de celui des cuisines, l’entreprise américaine n’aura jamais réussi à regarnir ses équipes convenablement après la pandémie.

« Red Lobster n’a pas une offre très haut de gamme, mais ce n’était pas de la restauration rapide non plus. Ils n’ont pas pu se rabattre sur l’automatisation et la technologie comme certaines chaînes bas de gamme, il leur faut donc du personnel qualifié pour opérer leur menu sinon ça transparait sur la qualité », remarque Frédéric Dimanche. « Et quand la qualité commence à manquer, petit à petit les clients vont partir. »

Des frais fixes trop élevés

Le type de locaux prisés par la chaîne, généralement de très grandes salles dans des secteurs où le pied carré coûte cher, n’a pas aidé l’entreprise à se garder à flot, remarquent les chercheurs. « C’est vrai pour Red Lobster, mais c’est aussi la réalité des restaurateurs indépendants : les frais fixes sont souvent l’angle mort qui vient saper la rentabilité », souligne Robert Laporte.

Selon lui, ce ne serait d’ailleurs pas un hasard si la plupart des restaurants québécois de la gamme de Red Lobster ont considérablement diminué la taille de leurs salles à manger et donc de leurs loyers dans les dernières années. Ce serait par exemple le cas des rôtisseries Saint-Hubert et de la Cage - Brasserie sportive qui ont réussi là où la chaîne américaine à failli, rappelle le chercheur.

« Il ne faut pas oublier non plus que les produits vendus par Red Lobster, le homard, le crabe, les crevettes, les pétoncles et autres fruits de mer étaient déjà très chers en plus d’être frappés durement par l’inflation, à un certain point ils n’avaient tout simplement pas la marge de manœuvre pour adapter leurs prix », précise Frédéric Dimanche.

Une image de marque confuse

Pour qu’un restaurant réussisse dans le marché d’aujourd’hui, remarque Robert Laporte, il faut impérativement qu’il offre une expérience intéressante. « La restauration est un espace social, autant pour le personnel que la clientèle qui ne s’y déplace pas seulement pour la nourriture, mais aussi pour voir et être vu », poursuit-il. « Elle a donc une force identitaire et à ce niveau Red Lobster essayait de projeter un certain raffinement pour aller avec ses prix élevés, mais au final le service était assez "Mcdonalisé", ce qui entraine une certaine dissonance. »

D’un point de vue marketing selon lui le seul atout dont disposait encore la chaîne américaine résidait dans une certaine nostalgie de la part de la clientèle. « Mais la nostalgie, ça ne fait pas grimper le chiffre d’affaires et ça n’apporte pas la rentabilité non plus », souligne-t-il.

Il serait donc réducteur de ramener les difficultés de Red Lobster aux seuls impératifs vécus par les restaurants de milieu de gamme suivant la pandémie, remarque le chercheur. « Il y a plusieurs contre-exemples dont les pizzerias 900 au Québec qui opère un peu dans le même créneau, mais qui ont su bâtir une expérience intéressante, basée sur des produits de qualité et du personnel bien formés, et ce malgré une certaine standardisation », illustre-t-il.

« L’important c’est de créer de la valeur, si on y arrive il y a de bonnes chances que la clientèle soit au rendez-vous », conclut Frédéric Dimanche. Pour Red Lobster, l’équation était trop grosse dans un contexte économique fragile.

Mots-clés: Canada
Restauration

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