Est-ce la fin de la crevette nordique ?

S’il peut être difficile d’acheminer les produits de la mer québécois aux restaurateurs d’ici, la crevette nordique a longtemps été l’exception qui confirme la règle.
Par contre, ce fruit de mer dont la saison de pêche 2025 s’est ouverte cette semaine pourrait ne plus être disponible avant longtemps, car sa population et l’industrie qui repose sur sa capture sont désormais menacées par les changements climatiques.
En effet, la crevette nordique est très sensible au réchauffement des eaux du Saint-Laurent qui vient perturber son cycle reproducteur et sa capacité de s’alimenter selon Pêches et Océan Canada. En 2022, la température moyenne de l’eau profonde du fleuve était de 7 degrés Celsius ce qui a été dévastateur pour la crevette qui a besoin d’eaux entre 2 et 6 degrés pour prospérer.
Une situation qui, combinée à la reprise de la population de sébaste du Saint-Laurent, un de ses principaux prédateurs, a mené à un effondrement drastique de la crevette nordique.
En effet, s’il s’est pêché 65 000 tonnes métriques de crevettes nordiques à l’apogée de la pêche en 2010, les quotas émis cette année ne seront que de 3809 tonnes soit environ 6 % de ce qui était disponible il y a seulement quinze ans.
Peu de crevettes, pas de pêcheurs
De plus, il est fort possible que les pêcheurs du Québec et des Maritimes décident de ne pas se prévaloir de l’ensemble du quota disponible. Comme le souligne l’organisme Mange ton Saint-Laurent, toute l’industrie de la pêche à la crevette est pensée et organisée pour s’accommoder de gros volumes, si bien qu’il n’est tout simplement pas rentable pour les pêcheurs et, surtout, pour les transformateurs d’ouvrir pour s’accommoder de petits volumes.
C’est ce qui est arrivé l’an passé où seulement 5 des 12 entreprises de pêches à la crevette du Nouveau-Brunswick ont finalement tenté leur chance en mer, selon l’Association des crevettiers canadiens du golfe (ACAG).
« Ç’a été mieux que je le croyais parce qu’on pensait avoir une petite saison et j’ai pu pêcher le quota d’une autre entreprise, ce qui m’a beaucoup aidé », avait alors confié à Radio-Canada Stéphane Thériault président de l’ACAG.
N’empêche que si les années de petits quotas s’enchainent, il est fort probable que les pêcheurs se détournent pour de bon de la crevette, lui préférant d’autres espèces comme le sébaste ou encore en quittant le métier en entier.
En attendant, continuer à commander et à servir de la crevette nordique reste un choix éthique pour autant que l’on puisse en trouver, rassure Mange ton Saint-Laurent. L’organisme rappelle que la pêche à la crevette canadienne est bien régulée et n’a pas réellement d’impact sur la viabilité de l’espèce.
Il est donc encore temps d’en servir… pour l’instant.